Bonjour Éric, Depuis combien d’années travailles-tu dans le milieu de la publicité ?
Depuis OS 8.5.1 exactement.
Quel a été ton parcours, tu viens d’où ?
Au départ, je m’étais un peu perdu en science éco pendant trois ans. La moitié des étudiants voulaient réussir dans la finance et l’autre moitié voulait se marier avec ceux qui réussiraient dans la finance. Pas mon univers, mais j’y ai fait beaucoup de maths. C’est très utile les maths. Ça structure le raisonnement, la pensée, et donc les idées. C’est presque un atout caché pour les créatifs. Si si.
Après, je suis passé par Sup de Pub, beaucoup moins de maths. Directement derrière, j’ai pu démarrer chez CLM, puis la Young, longtemps chez FCB, re-la Young, puis trois belles années de freelance où je suis passé dans un paquet d’autres agences. Et là, j’ai posé mes valises chez Libre il y a deux ans. J’adore l’esprit. Libre…
As-tu hésité à faire de la pub ? Tu aurais fait quoi à la place ?
J’aurais adoré être pilote, mais j’avais la phobie de l’avion. Il y avait une forme d’attraction-répulsion. Un “je t’aime moi non plus“ aéronautique. Je suis resté sur terre, mais le nez en l’air.
Tu es fan de quoi ?
Ce que j’admire par-dessus tout, ce sont les personnes avec de l’esprit. Ricky Gervais, Jim Jefferies, Louis C.K, Larry David, Alexandre Astier, le talent à ce niveau-là, ça me rend dingue. Terriblement envieux même. Là, oui, je suis vraiment fan.
Ce genre de personnalités sont comme des guides pour moi, des maîtres à penser.
Musicalement, je ne saurais jamais où me placer. Je suis dans un grand écart permanent qui va de Prodigy à Keith Jarrett, mais il faut que ça secoue ou que ça vibre. Je zappe en 3 secondes. Écouter du son en voiture avec moi, ça peut vite donner envie de sauter en marche.
Tu as travaillé sur quels budgets ?
Ah, on reparle boulot ? Ok… pour les budgets, c’est hyper varié. Ces trois dernières années, il y a eu Netflix, Chanel, des ministères, des magasins de bricolage, des yaourts… C’est vaste, mais c’est toujours aussi cool de pouvoir toucher à tout. Après, l’idée d’être mono-budget pourrait se faire, mais en y apportant de la fraîcheur, de la surprise et des variations au fil du temps. Construire une marque sur la durée, c’est passionnant.
Et sinon, très récemment chez Libre avec Antoine Colin, on a fait des choses dont on est content sur UCAR, Melba, Dressed, Caméléon…
Dans les très récents :
UCAR
Association Cameleon
Pomme de pain
Bricomarché
Dans les plus anciens :
Mes radios compilées ici :
Euromillions
Leerdammer
Mes débuts ( avec Michel Hazanavicius )
Scoot
Si tu ne devais en retenir qu’un seul ?
Celui qui m’a tenu le plus à cœur, je dirais Oasis, la saga avec les fruits que j’ai conçus en 2004. Vingt ans après, la recette ne bouge pas. Des fruits, de l’eau et du fun. Pour la petite histoire, c’était un brief de couloir. J’étais en train de traîner entre deux bureaux, Guillaume Pannaud m’alpague et me demande un truc pour dans deux jours à présenter chez Oasis. Il rigolait, mais pas tant que ça Guillaume.
Le soir, j’ai griffonné un vague Bob Razowsky avec une peau d’orange, deux gros yeux, je lui ai collé la voix de François Pérusse sur Final Cut et j’ai écrit quelques blagues pour voir ce que ça donnait.
Le client a adoré, il n’a pas écouté les tests qui assuraient que ça ne marcherait jamais et on a fait trois films dans la foulée, puis cinq autres, et encore et encore. Beaucoup de rigolade avec Pierre Coffin, le réal (qui préparait son « Moi, moche et méchant » en même temps).
Ça a duré quatre ans, puis les fruits ont grandi et Marcel les a tous mangés. Je devais rejoindre la marque là-bas, j’ai refusé la proposition de Publicis, par loyauté pour mon agence, oui monsieur ! Avec quelques années de recul, c’est le seul choix que j’ai regretté. Mais très beau boulot de Marcel… Joyeux anniv les fruits, 20 ans… ça fait rêver.
Tu as des projets parallèles en dehors de ton métier ?
Toujours ! Il faut, sinon je m’endors. Là, je viens de terminer un podcast, un conte musical pour enfants, et parallèlement, je développe une appli audio d’épanouissement un peu hum hum pour adultes, avec des sexologues et des amis chelous. J’essaye de ne pas mélanger les sujets parce qu’un conte sexuel pour enfants, pas sûr que ça passe, même si c’est musical. Et puis la photo, toujours la photo…
https://smartlink.ausha.co/willy-nimbus-et-les-contes-de-le-route
Quel est ton meilleur et pire souvenir de pub ?
Les bons et les mauvais moments, c’est toutes les semaines. C’est un métier à émotions. Tu sais, cette émotion quand l’idée arrive : tu t’emballes, tu es comme un chat avec les pupilles dilatées devant une mouche, tu es à fond. Et les idées surgissent n’importe quand, n’importe où. C’est ça nos meilleurs moments. Et cette vibration-là, c’est une sensation qui ne s’altère pas avec le temps.
Et puis malheureusement, cette idée, elle finit souvent à la poubelle, comme 99 % du boulot. Ce sont ces frustrations-là, les pires moments. Au début. Parce que bon, au bout de quelques années, t’en souffres plus du tout.
Ça devient la norme et t’es déjà ailleurs, dans la recherche de la prochaine idée. C’est un peu comme ne vivre que des coups de foudre, mais pas les relations qui vont avec. C’est beau hein ? Faudra que je la ressorte à un dîner celle-là.
C’est qui ta génération de créas, ceux avec qui tu as grandi ?
Des gens très marrants, beaucoup de garçons, parce qu’il n’y a encore pas si longtemps, le métier de créatif, c’était un grand boys band. Alors, il y a Francis Deligt, Guillaume Auboyneau, Eric Helias, Eric Astorgue, Alban Penicaut, Dominique Marchand, Loïc Mercier qui est planeur, mais très très créatif, donc je le compte dedans.
Quelles sont les pubs que tu préfères, tes classiques ?
Dutch Barn (Ricky Gervais, oui encore), Dos Equis, The Most Interesting Man in the World, MTV, Familiprix, Loto, Epuron (Mr W), Proximus. J’aime quand ça parle, le dialogue, le texte, quand il y a de l’esprit, du jeu ou de l’absurde. Le dialogue, c’est toujours un risque. Mais quand ce n’est pas trop lisse, alors c’est payant, c’est drôle, c’est touchant aussi. C’est aussi pour ça que j’aime profondément la radio et le podcast. C’est un vrai terrain de jeu pour les rédacs qui aiment les mots.
DUTCH BARN
DOS EQUIS
FAMILIPRIX
PROXIMUS
LOTO
EPURON
Tu as des modèles de créatifs dans la publicité ou en dehors, des gens qui t’inspirent ?
Sans parler de modèles, il y a beaucoup de créatif dont j’admire le travail. L’esprit de Gabriel Gautier, la plume le Jean-François Bouchet, l’évidence de Dominique Marchand, l’inventivité de Pascal Grégoire, et puis pas mal de nouveaux réals. Et en dehors de la pub, oui, bien sûr, tout le monde m’inspire.
Tu vois quoi comme changement entre tes débuts et maintenant ?
Tout change évidemment. Si l’idée reste le cœur du réacteur, la manière de la travailler se transforme en permanence. On peut dire que tous les 5 ans, une grosse mue s’opère. On évolue, mais surtout, on apprend. On apprend tout le temps. Chez Libre par exemple, les équipes sont transgénérationnelles. Juniors et seniors ont totalement fusionné. On fonctionne avec des pools créatifs, un peu à l’image de pools de scénaristes. On mixe la génération techno-native à celle qui a les codes de la com. On fait ensemble, on s’apprend, on s’éduque. Ça résout beaucoup de choses, y compris les problèmes d’égo et on peut dire que rien que pour ça… C’est mieux maintenant.
Un conseil pour réussir quand on commence dans ce métier ?
Se cultiver, toucher à tout, rester curieux, respecter le brief, mais faire TOUJOURS un pas de côté. Écrire, lire, relire, recommencer. Rester sympa parce que les ascenseurs ça monte et ça descend. Choisir des idées simples, mais les développer à fond et dans tous les sens. Trouver celles qui font appel à l’intelligence des gens. Manger cinq fruits et légumes. Bouger… d’agence parfois, mais pas trop.
Son portfolio : www.lavenac.com