Bonjour Raphael tu es créa chez DDB, quels ont été ton parcours pro/études ?
Après un DUT Publicité, je me suis retrouvé un peu par hasard à Sup de Pub Paris, où j’ai commencé à apprendre la Direction Artistique. Puis après un stage de 3 mois chez CLM BBDO avec Anne de Maupeou mon ancien rédac et moi on a été engagé. Donc, entre payer une école, et se faire payer en agence, le choix était vite fait.
Puis la direction de CLM BBDO change avec la nomination de Gilles et Jeff (Sacco et Fichteberg), mon rédacteur de l’époque qui décide d’arrêter, on rentre une grosse compétition, alors qu’on débute le métier, c’était un moment bien contrasté. Et pendant cette période, la sortie du print Football Résistance, qu’on avait fait avant son départ. Bon, voilà, tu commences dans la pub.
Depuis combien d’années travailles-tu dans le milieu de la publicité ?
Depuis mes 23 ans, avec une année d’interruption après cette première expérience. J’ai donné des cours de musique en prison, comme été payé pour porter des parfums Jean Paul Gaultier, et bossé avec Sully Sefil en tant qu’ingé son (même moi quand j’écris ça je ne comprends pas tout).
Puis premiers pas en freelance, pour TBWA, et puis Grey avec un italien, dans The Kitchen, où j’y trouve Constance, et Jérémie, et Xuan. Puis, on part tous les deux chez DDB Paris où nous sommes actuellement. Ça fait 8 ans que nous sommes là, et j’ai 31 ans.
Tu as hésité a faire de la pub ?
Pour moi la pub, tout comme un choix de média, est fait en fonction d’un objectif à réaliser.
Mon idéal jeune, c’était de beaucoup vadrouiller, travailler avec des gens différents, des photographes, des illustrateurs, des créatifs, comme des businessmens, etc
Au final, j’ai l’impression que désormais on est souvent derrière un bureau, où on fait beaucoup de gestion de projet.
Donc, pour se renouveler, j’ai eu envie d’apprendre à réaliser des films, à faire des applis, à aller vendre des projets, à gérer les devis. C’était donc un choix plutôt naturel au début, aujourd’hui, je trouve que créatif reste un métier passionnant, pas reconnu à sa juste valeur. Les clients pourraient nous appeler « consultants » si on sortait d’HEC, et se faire rémunérer pour notre potentiel à apporter des solutions. Mais parfois, en vrai, on te demande de rajouter des gouttes d’eau sur le packaging.
Tu travailles avec qui et sur quoi ?
Je travaille en team avec Constance Godard, avec qui on a fait la campagne Volkswagen – Kids dernièrement. Ça commence à faire un bout de temps qu’on chemine ensemble, et c’est quelqu’un dont j’aime vraiment le caractère, ce qu’on a pu devenir ensemble. Je dis ça au delà de son talent de créatif, je parle vraiment de caractère, l’envie d’être justes, d’être honnêtes, de dire quand le brief est pourri, ou quand ton DC se plante, avec le goût de vouloir bien faire.
C’est un mix entre force et humilité, c’est pour ça que je la supporte quand elle sait pas pourquoi l’imprimante déconne.
Sinon, on travaille avec Alexandre Hervé, et un peu de Kaltchev par ci et par là en fonction des pitchs. Du coup, du VW, L’Equipe, et en ce moment, du pitch, et du pitch.
Parles nous de deux trois choses que tu as faites en agence :
Récemment , on a sorti le film « KIDS » pour Volkswagen
https://www.youtube.com/watch?v=Wl9cR2GovfU
https://www.youtube.com/watch?v=t19IRa-7e8s
https://www.youtube.com/watch?v=Dh9uF5emfl0
Tu fais quelque chose en parallèle de ton métier, des projets ?
Oui, grave. J’essaie de tout apprendre, pour comprendre et intégrer différentes logiques.
Donc comme tout le monde, j’ai fait de la réalisation, avec un copain Gaston et d’autres amis, après plusieurs clips, on fait une campagne dont je reste assez fier, genre ça :
On a sorti un EP : Emmanuelle – Glory Wall –
Parfois, on fait de la réal pour filer un coup de main :
ou encore ça :
sauf que parfois ça choppe un Lion.
Et très récemment, je me suis payé une formation de 3 mois chez TheFamily
http://www.thefamily.co/#welcome
en GrowthHacking, c’est disons, différent, mais bel et bien des métiers, comme le community manager (j’aime moins celui-là) qui deviennent des nouveaux postes importants dans les entreprises telles qu’on les connaît.
Le growth hacking, c’est quoi ?
Alors, c’est un mélange entre créatif, marketing manager de startup, et dév/hacker. C’est un métier dans les environnements startups, où tu proposes des solutions (variées) à un problème, tu testes, vérifies en mesurant si ça marche, et tu implémentes. Le gros du boulot, c’est de trouver un moyen de faire plus de croissance, se faire remarquer, et TOUT est autorisé.
Hacker un concurrent de façon maligne,
le hack de AirBnb avec Craigslist est le plus connu
https://growthhackers.com/companies/airbnb/
comme optimiser le message sur tous les canaux. Finalement, ça s’inspire pas mal de projets de pubs, de coups de comm, et c’est ce qui cultivait mon intérêt : comment ces types qui ont des croissances à deux chiffres chaque mois, voient notre travail, et s’en servent.
Dans ton métier quel est ton meilleur souvenir ?
Je crois que c’est aussi le meilleur souvenir de Constance (sauf qu’elle je pense que c’est carrément un des meilleurs souvenir de sa vie) Me prendre une baffe du DG sur le gain d’une compet INPES, parce qu’il a raté son high 5, il m’a défoncé le visage, preuve :
Je ne répondrais pas aller chercher un prix à Cannes, moi les piscines, cigare et whisky, ça n’a jamais été mon truc, vu que je suis plus quinoa.
Ton pire souvenir ? Le truc qui t’as fait le plus halluciner ? que tu ne pensais pas faire un jour ?
– Bosser en parallèle sur une campagne d’un opérateur télécom et en même temps sur campagne de prévention sur les dangers des ondes de téléphonie mobile (error 404)
– Pondre un print avec ma mère au téléphone. ( Footballresistance)
– Comprendre que ton agence se fait payer pour présenter des idées qu’on sait pertinemment que on ne fera pas, mais on les présente pour remplir des réunions. C’est peut-être ancienne école, mais si on fabriquait des tartes au citron, et qu’on vient t’en commander 10, et qu’on te dit
« Non, c’est pas pour les manger, on les regarde et on les jette, c’est tout »
« …. »
Heureusement, c’est pas le genre de la maison DDB.
Quelles sont les pubs qui t’ont le plus marquées ?
Il y en a tellement, tellement, j’ai des dossiers remplis de screenshots de plein de trucs, comme ça :
NEWCASTLE BROWN ALE –
Simple, directe, et symptomatique de notre époque. Oui, tu peux faire du « rien » avec brio, bim.
Diamond Shreddies :
NET 10 – No evil
http://droga5.com/work/evil/
et cette campagne aussi :
http://droga5.com/work/evil-animated/
J’adore ce truc sinon : Les légumes moches :
https://www.youtube.com/watch?v=GRteoKOJzxg
Et à titre perso, je suis entré chez CLM parce que j’avais vu ça :
Il y a des modèles de créatifs dans la publicité ? des gens qui t’inspirent ?
Rory Sutherland, son talk classique :
D’autres dont tu lis les bouquins mais je suis nul à me rappeler les noms.
Droga, c’est quand même vraiment, vraiment assez costaud comme structure. Ils peuvent vendre le premier jour de la retraite comme personne, alors que c’est un sujet assez chiant.
Sinon j’aime réellement suivre les péripéties des agences qui se montent et grandissent en France, comme tu peux voir Buzzman monter en quelques années, ou FF avec Ben&O, tu attends la suite, tu te demandes ce que va donner Jésus.
Tu as envie que tes « concurrents » y arrivent. Parce que l’adversaire, finalement, c’est plus la mauvaise pub qui fait vendre, que le créa qui choppe un prix avec un proactif pour aider les SDFs.
J’ai vraiment aimé nos premières années chez DDB, je suis autant inspiré par le rédac stagiaire qui galère, que par Pierre et Alexis quand ils bossaient sur Mini et leurs cernes qui se creusaient.
Et Jean-François qui t’envoie un fichier word de ses accroches, et tu en as 56 où tu rigoles une fois sur une.
Ah oui, et inspiré par Gauthier Fage, un type à connaître, mais de loin.
Mais lui il s’intéresse surtout à Constance.
Et puis mon patron (NDLR :Alexandre Hervé), parce que c’est un être humain avant d’être un patron. (Bon il a toujours eu du mal à prononcer mon nom de famille)
Et en dehors de la pub ?
J’aime beaucoup les créatifs « complets » qui savent être patrons, comme bons créatifs, comme ingénieurs.
Du coup, ceux qui m’inspirent sont plus des Boyan Slat -The Ocean Cleanup – theoceancleanup.com
Alice Zagury – partner à The Family et tout leur collectif (idem chez les gens du Nuba, etc…)
http://www.latribune.fr/blogs/generation-peur-de-rien/20141026trib33f87d5e7/alice-zagury-la-marraine-republicaine-des-entrepreneurs.html
Paul Graham – Y Combinator – Et Seth Godin, du même acabit, qui inondent les US de »doers » innovant dans tous les domaines. Ca donne Airbnb, Stripe, et Instacart, qui sont nos futurs clients, et qui ont pas besoin d’agence de pub. Des gamechangers assez costauds quand même.
Jamie Oliver cet homme devient une marque, il va devenir un supermarché, une application, en plus d’être un mouvement.
Sinon, coucou à Erwan de Simplon.co, un de mes meilleur copains. Bravo.
Tu vois quoi comme changement entre tes débuts et maintenant ?
Le rythme s’accélère, mais je trouve ça pas plus mal, si ça ne détériore pas la qualité (paradoxe). Sinon, est-ce que le métier a vraiment changé, ou alors est-ce que c’est les médias ? Ah oui, y’a eu internet, ça change, oui.
Tu penses que le milieu va évoluer de quelle manière ?
Justement, ça m’intéresse réellement. Je n’ai pas de point de vue établi, mais à force de bosser à côté de startups, et autres copains dans le milieu, je vois les Tesla et Uber, qui fonctionnent quasi sans avoir d’agence de pub, et qui sont les géants de demain. Quand tu vois aussi que tout le monde sait faire des films, les prods font des propositions, et que même minutebuzz a un studio créa et fait « de la pub », j’ai l’impression que il reste de la place pour les grandes agences, mais qu’elle seront plus chères.
Pourtant je suis convaincu de notre valeur ajoutée, mais perplexe quand tu te mets du côté client. L’impression que il n’y a parfois que nous qui nous rendons compte du potentiel des idées. Du coup, j’ai l’impression qu’on ne sait pas ce qu’on fait même dans 3 mois, mais que c’est la contrainte de notre travail, être là quand on a besoin de nous.
Si tu commençais la pub aujourd’hui, tu irais ou ?
Chez Apple ? Où j’irais dans une grande agence, avec quelqu’un avec qui j’ai un bon contact.
Parce que il n’y a au final presque que ça qui compte, apprendre des interactions avec les autres, et pouvoir sortir des projets. Sinon, hors agence, je conseillerais d’aller chez TheFamily, ou dans le studio créa de Simplon, ou de faire ta propre structure, et de commencer petit, mais de rester fier de chaque petit pas que tu fais. Sinon, venez-nous voir.
Que dirais-tu a un team de stagiaire qui veut percer dans le milieu publicitaire ?
Je dirais, up to you. Tout d’abord, tu coûtes pas cher, et il n’y a rien à perdre. Littéralement. Retrouver le même salaire ailleurs, c’est facile. Donc, tu tomberas pas plus bas qu’un SMIC, c’est le moment de faire des trucs, de se rater, de comprendre pourquoi, et d’avancer avec ce que tu peux apprendre en faisant.
Créatif, c’est le seul métier, où on peut voir concrètement ce que tu fais, dans un portfolio. Donc si tu as envie de faire des trucs cools, fais-les, et montre-les. Zou.